Molières et la mine : toute une histoire
C’est vers l’an 1000 après JC qu’apparaissent sur les versants de la Cèze les premières terrasses, les premiers murets de pierre sèches appelés ”faïsses” dans le registre du patois cévenol. Un palette typique de nos Cévennes. C’est aussi à cette époque que les moines de l’abbaye de St Gilles construisent la chapelle de Meyrannes.
Entre 1200 et 1500 : Édification du château du Montalet. Dans cette période moyenâgeuse l’habitat est regroupé autour de petites entités. Les chênes, le ramassage des glands pour les animaux domestiques sont un apport important pour ces populations aux conditions de vie difficiles qui vivent en autarcie.
Vers 1600 : L’ économie pastorale se tournera vers l’entretien des châtaigneraies. On parlera de ”l’arbre à pain cévenol” bien utile en périodes de disette.
Vers 1650 : L’élevage du ver à soie va se développer dans la vallée de la Cèze (Mas Agniel aux Brousses – filature de St Ambroix) ce qui va favoriser le développement du mûrier,un arbre aujourd’hui en voie d’extinction.
Pour l’anecdote, en 1752 l’abbé de Malves constate des teneurs en or des sables de la Cèze au lieu dit ”la mine d’or” sous le château du Montalet (sans pour cela déclencher une ruée vers l’or !!.)
En 1830 d’importantes couches de charbon sont mises à jour à Molieres. Des 1841 un jeune ingénieur Ferdinand Chalmeton, embauché par la compagnie des mines, va être la pierre angulaire du développement économique de la vallée de la Cèze.
De 1854 à 1857 les premiers puits de mine vont surgir en bord d’une rivière aux caprices redoutés, avec leur chevalements, signe de reconnaissance des pays miniers. Les puits Silhol et d’Estampes sont les précurseurs d’une entrée fracassante des Cévennes dans la révolution industrielle. À cette même période est construite la ligne de chemin de fer Béssèges -Alès.
Le 16 mars 1882 suite à un décret signé par le président de la république Jules Grevy nait la commune de Molières constituée de 3 parcelles détachées de communes limitrophes : Meyrannes – Robiac – St jean de valériscle
De 1914 à 1928, quatrepuits d’extraction font passer de 80.000 tonnes à 300.000 tonnes la production charbonnière de Molieres. La commune comptait alors 2984 habitants, une des communes importantes du département. L’entreprise minière employait 3000 ouvriers.
La compagnie des mines puis plus tard les Houillères des Cévennes (nationalisation) sous les pressions syndicales, au cours des décennies, avait développé des structures nouvelles pour l’époque avec l’accès gratuit au chauffage – logements – pharmacies – docteurs – hôpitaux- centres de vacances – centres d’apprentissage au métier de mineurs – pris en charge entièrement par l’employeur.
C’était un état dans l’ÉTAT avec ses règles, son fonctionnement. Dans les villes minières une phrase tournait en boucles au sein des marchés locaux:” femmes de mineurs, femmes de seigneurs” .
Une population molièroise grouillait de ses cités, de ses 17 bars, de son club de foot, de ses écoles” la laïque, la privée”…
L’ implantation du pin maritime pour étayer les galeries de mines repeint le paysage cévenol. Cette espèce se régénère facilement et colonise de nombreuses parcelles laissées à l’abandon. Des jardins ouvriers disséminés en bord de Cèze, quelques arpents de vigne autour des hameaux, à l’ombre des terrils témoignent encore de la vie de ces paysans -mineurs, attachés à leur territoire.
De 1939 à 1944 : Accroissement de la production et modernisation des infrastructures, la production passe à 500 000 tonnes. On fait appel à une main d’oeuvre étrangère : polonaise – italienne – espagnole – Nord Africaine.
Le hameau des Brousses était un bastion de la communauté polonaise, avec ses coutumes, son instituteur.
Dès 1956 net ralentissement de la production due à la découverte d’autres sources d’énergie.
1966 : Arrêt de l’exploitation du ”fond ” à Molieres en 1973, le 1er chevalement qui avait vu la naissance de Molieres est dynamité (puits Silhol)
Aprés des années de luttes ouvrières, le 12 janvier 2001 marquera l’arrêt définitif de tous les puits de mine des Cévennes, une région qui conjugua sa vie avec celle de la mine.
Une page se tournait mais de part la dureté du travail, le prix payé (accidents, silicose) par certaines familles, les mots solidarité, fraternité et entraide sont des mots qui retrouvent tout leur sens dans notre culture cévenole.
En 1995, fidèle à sa tradition de terre d’accueil, la commune a accueilli plusieurs familles de réfugiés fuyant la guerre en ex-yougoslavie… Certaines de ces familles sont encore présentes sur le sol molièrois.
Aujourd’hui, une autre histoire est à reconstruire….